Bebe : girly avec du chien

 Il ne faut jamais être en retard avec les jolies filles .Il est même conseillé d’arriver en avance; on n’est jamais trop prudent: si un autre fiancé est déjà là, on a le temps de lui faire un croche- pied ou de lui casser la gueule. Voici donc la jolie Bebe, brune, espagnole, avec son dernier opus, Un pokito de rocanrol qui ne sera dans les bacs que le 5 mars prochain. Un bon disque, c’est incontestable. La jeune femme déroule une manière de rock-punk énervé, assez déjanté, puissant et bien envoyé. Elle fait un pied nez à la convention, impose un style. Son style. Pour ce faire, elle a choisi de faire produire son disque par l’excellent Renaud Letang (qui joue aussi de la basse et des claviers).Le tout a été enregistré au mythique studio Ferber, à Paris. On y sent une âme, grâce à l’utilisation de vrais instruments. La langue espagnole se prête merveilleusement bien au rythme effréné de la diction de la dame. Ça déboule. On a envie de marquer la mesure. C’est bon signe. Un disque stimulant. Ses textes parlent de filles, d’amour. «C’est girly, mais un côté girly qui a du chien», comme le note non sans à-propos Émilie Cailleau sur le site de notre confrère L’Express.

PHILIPPE LACOCHE

«Un pokoto de rocanrol». Bebe.EMI-Virgin. (Sortie le 5 mars).

Rayonnant Aubert !

L’ex-chanteur de Téléphone revient de façon magistrale avec un double et un DVD exceptionnels de générosité et d’émotion. Beau à pleurer.

C’était le 2 mai1977. Première partie d’Eddie And The Hot Rods au Pavillon de Paris: Téléphone «vole» le show à la tête d’affiche, pourtant un excellent groupe de pub rock anglais. Magnifique, magistral; de la dynamite et surtout, surtout, une aura à vous couper le souffle. «Qui c’est ce groupe?» pouvait-on entendre dans l’assistance. On sentait bien qu’il venait de se passer quelque chose, qu’un grand gang de rock’n’roll était en train de naître. Peut-être même le plus grand car terriblement français même s’il allait puiser ses racines chez les Stones, les Them, les Pretty Things et les Who. Et de vrais textes. Jean-Louis Aubert, Bertignac, Kolinka et Corine avaient quelque chose de générationnel qui, on le sentait de par son côté populaire, resterait dans les mémoire. Comme quand, en mai1968, «Jumping Jack Flash», des Stones, déboulait sur les platines. «Jumping» symbolisait Mai 68; Téléphone préfigurait ce qui serait les années Mitterrand quatre ans plus tard. Et puis il y eut d’autres concerts, en province. D’autres salles des arts et loisirs, comme celle de Tergnier, en janvier1978.Trente-cinq ans plus tard, Jean-Louis Aubert nous surprend toujours en sortant Live= Vivant, un prodigieux album live équipé d’un DVD du meilleur cru. Et c’est exceptionnel; certainement la meilleure production discographique depuis pas mal d’années. Car trop souvent les albums live sont mal ficelés, pas très utiles, et servent de remplissage aux artistes en manque d’inspiration. Là, on est à l’antithèse de ça. Ce disque est essentiel. Il y a un souffle, un esprit, une urgence, une générosité. Aubert, Kolinka et leur équipe sont au meilleur de leur forme. L’entrée de Jean-Louis, dans l’ombre bleutée, 12 cordes et porte-harmonica, sourire plus jaggerrien que jamais, est sublime. La section de cuivre est digne de celle de Graham Parker à la fin des seventies. «Je reviens mouillé et même un peu ridé (…)J’ai appris la vie.Je reviens vers vous et je n’en reviens pas d’être toujours là…» chante Aubert. Par moments passent les ombres de Guillaume Depardieu, de Barbara, de son copain Olive (décédé en 2006), de William Burroughs. Richard Kolinka n’a jamais été aussi Keith Moon et Gary Brooker à la fois.

Jean-Louis Aubert : un album magique.

Dans «Ça, c’est vraiment toi», Jean-Louis et ses deux guitaristes font une battle de chorus à la Gibson, et c’est bien sûr le titulaire de la Lespaul Deluxe (la plus puissante) qui triomphe. «On aime (comme a été aimé)» une chanson d’amour belle à pleurer. Début à la gratte, montée d’orgue, puis de piano; on dirait Procol Harum dans Exotic Bird and Fruit. Un double, un DVD et un chanteur rayonnants. Merci Jean-Louis!

PHILIPPE LACOCHE

«Live= Vivant », Jean-Louis Aubert. EMI-Virgin.