La poésie de Frégni sous le soleil

Dans son dernier roman, René Frégni, intarissable conteur, nous raconte la vie d’un homme meurtri, passionné de boxe et d’écriture.

Dans Sous la ville rouge, dernier roman de René Frégni, on le retrouve, d’emblée, avec son univers, ses ambiances, son souffle. La rue, violente, terrible, calcinée sous le soleil du Sud. Malgré son transfert de chez Denoël à la blanche de chez Gallimard, on retrouve le Frégni qu’on aime, cet écrivain majeur de Manosque, aussi bon conteur qu’un Giono qu’il admire… Frégni s’était imposé dès son premier roman Les Chemins noirs (Prix Populiste 1989), succès confirmé par d’autres grands livres dont Les nuits d’Alice (Prix spécial du jury du Levant 1992), Elle danse dans le noir (Prix Paul-Léautaud 1998) ou Tu tomberas avec la nuit (Prix Nice Baie des Anges 2008).

Candeur lucide

Il nous raconte les pérégrinations de Charlie Hasard, un Marseillais solitaire qui ne vit que pour la boxe et l’écriture. Pour cette dernière, ce n’est pas simple : les éditeurs, trop nombreux, refusent ses textes. Il s’entête avec une candeur lucide, comme il s’obstine sur le ring, frappe en silence, «  les dents serrées, la rage travaillant chacun de ses muscles, le moindre de ses nerfs. »

Il a l’impression de frapper le petit monde «  arrogant et repu » qui le méprise. Ce tout petit monde d’élus qui veillaient jalousement à ce que personne ne pénètre dans ce cercle très privé d’honneur et de lumière. »

Charlie Hasard boxe parmi un peuple d’humiliés, « de bafoués qui musclait sa revanche. Un peuple qui n’existait que sur le ring en rendant coup pour coup. ».

Une première lettre de refus d’un éditeur, ses illusions s’effondrent; un lourd sentiment d’injustice l’envahit. Pour le libérer, il monte sur le ring et massacre son adversaire. La boxe : son exutoire.

Un jour, un éditeur parisien semble intéressé par l’un de ses manuscrits. La vie de Charlie va-t-elle changer?C’est certain mais pas tout à fait comme il le voudrait… Il va endurer l’enfer, l’horreur.

Au passage, l’édition germanopratine est égratignée.

René Frégni nous

René Frégni, écrivain. Juin 2013.

donne un thriller haletant porté par la poésie lyrique d’une écriture imagée. On y parle, par exemple, « de la faucille noire des hirondelles qui découpaient entre les toitures un ciel encore très clair ».

Cette fable envoûte. Du très bon Frégni.

Philippe Lacoche

« Sous la ville rouge », René Frégni, Gallimard, 124 p.; 11,90 euros.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>